Félix Blume, à l’écoute du monde – Semaine du Minervois (Fr)

https://semaineduminervois.com/oupia-felix-blume-a-lecoute-du-monde

Invité d’honneur du festival Son MiRé de Fabrezan début septembre pour ses créations sonores, présent à Oupia à la galerie “L’Affenage” jusqu’au 11 octobre en compagnie de Franck Dautais pour des carnets de voyage, Felix Blume parcourt le monde, magnéto en bandoulière, casque vissé sur les oreilles et micro tendu pour capter toutes les bonnes ondes de l’humanité.

Une maman professeure de musique, un papa sculpteur mais aussi mélomane et joueur de violoncelle, Félix Blume se souvient que la musique remplissait sa jeunesse à Azillanet. De quoi aiguiser l’oreille et l’orienter très vite vers l’univers musical et sonore. Mais si la scène ne l’intéresse guère, c’est dans les coulisses, en régie qu’il se sent le mieux. A 16 ans, pour élargir sa palette, un premier stage avec André Dion, électroacousticien et créateur du festival SOnMiré de Fabrezan dédié à la création sonore. L’apprentissage se poursuit à Toulouse pour un BTS audiovisuel et Bruxelles pour une école de cinéma. Le voilà  prêt à découvrir tous les climats sonores du monde. Premier pas dans le métier pour un documentaire au Mali, et très vite le voilà avec l’étiquette de preneur de sons aventurier. En 2009, rencontre avec un artiste belge, Francis Alÿs qui l’entraîne à Tanger, au Maroc, pour un tournage et l’invite à le rejoindre au Mexique où il réside. Au fil des mois, Mexico deviendra son camp de base et son champ d’expériences artistiques, et très vite la reconnaissance des grands supports audiovisuels comme Arte Radio. L’idée d’offrir des paysages sonores s’affirme avec la terre de feu, le Venezuela, le Mali pour décor et source d’inspiration.

Si le micro est omniprésent, la caméra aussi s’invite dans son travail pour capter des petites scènes humoristiques et poétiques et traduire le travail de ce cueilleur de sons: “Félix dans le désert”, Félix sur un âne avec un micro en guise de carotte pour le faire avancer…en vain”, ” un micro accroché à un nuage de ballons pour capter le chants des oiseaux”…

Des projets et des prix

2014, retour à Mexico, avec comme objectif , “faire de cette ville bruyante, un ville sonore“. Alors s’installer au cœur du grand marché de la ville et enregistrer les vendeurs ambulants pour en faire un chœur polyphonique. Cela donnera “Los gritos de Mexico” qui lui vaudra le prix Pierre Schaeffer, ce qui est au son un peu le Goncourt pour le roman. Un prix  qui lui ouvre bien des portes à travers le monde, facilite ses projets et lui permet d’expérimenter de nouvelles approches, en se mettant à l’écoute davantage encore de la population. Exemple, à Mexico encore, travailler avec les personnes aveugles pour une idée simple et géniale: sonoriser les feux rouges d’une grande artère de la ville pour en faire une cartographie audio: ainsi près d’un magasin de musique, le feu résonnera de musique, près d’un arrêt de tramway, le tintement de la clochette présente dans les wagons, etc…Et à l’oreille, chacun pourra se repérer, se guider aux bornes qui ponctuent le chemin.

Légende d’Amazonie

Et l’aventure continue, jusqu’au cœur de l’Amazonie. Au départ, il s’agissait d’enregistrer tout ce qui fait la vie de ce grand poumon du monde, oiseau, reptiles et donner la paroles à ses habitants. Au fil des jours, dans le village qui l’accueille, la confiance se noue, la parole se libère, et très vite surgit une légende qu’on se transmet de famille en famille, l’histoire de la “Curupira”, mi-homme, mi bête, qui égare les humains dans l’immensité verte ou enlève les enfants, sans dédaigner les offrandes, les cigarettes par exemple… Cela donnera un film où le son est l’acteur majeur qui nous embarque dans cet étrange monde où fantasmes et réalités se nouent et s’entrelacent comme les lianes de la forêt. Là encore ce film trouve un large écho, accueilli dans divers musées et festivals du monde entier. Mais Félix a déjà d’autres chantiers en cours : enregistrer le chant de la mer en Thaïlande, à travers des bambous plantés sur le rivage pour tenter de retarder la montée inexorable des eaux dans ce pays, au Mexique encore pour donner la parole à un arbre sous la pluie, ou dans le désert pour enregistrer les habitants qui peignent avec les mots la palette de lumières qui baigne cette immensité.

Un travail riche d’humanité, de poésie, pour donner à entendre ce que bien souvent on ne prend pas la peine d’écouter et surtout pour Felix Blume, il s’agit d’édifier une grande bibliothèque sonore, pour garder la mémoire de ces vies multiples aussi éphémères que leurs échos.

Découvrir les créations sonores de Félix Blume et les aquarelles de Franck Dautais à Oupia à la galerie L’Affenage, du 19 septembre au 11 octobre, ouvert vendredi de 18 heures à 20 heures, samedi et dimanche de 10h30 à 12h30. Vernissage samedi 19 septembre de 11 heures à 19 heures. Atelier d’écriture dimanche 27 septembre de 10h30 à 13 heures sur réservation à cepagesdencres@wanadoo.fr. Décrochage – lecture dimanche 11 octobre de 11 heures à 13 heures.
Henry Migaud

Photos : Sergio Nahuel et Sara Lana